À l’issue d’une saison estivale jugée satisfaisante sur le plan de la fréquentation – le bilan final de l’année 2023 devrait confirmer ces bons chiffres –, le rôle du refuge de l’Arche, qui fêtera ses cinquante années d’existence en 2024, apparaît plus que jamais primordial et d’actualité. Rencontre avec Jean-Marie Mulon, son directeur.
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« Notre centre de sauvegarde accueillait en 2011 un peu moins de 300 animaux ; aujourd'hui, ce sont 1 000 de plus par an ! »
Nous sommes ici dans un refuge. Au-delà de la différence d’appellation, qu’est-ce qui le distingue d’un parc zoologique ?
La différence fondamentale porte essentiellement sur l’éthique. Ici, vous n’aurez jamais de reproduction, la priorité d’accueil étant donnée aux animaux sauvés et recueillis. Ici, nous n’avons pas la politique de l’animal objet et donc vous ne verrez pas de perroquet sur un vélo ou des spectacles de mammifères marins. Enfin, dans notre boutique à côté des quelques peluches, le visiteur trouvera majoritairement de la littérature en lien avec la préservation animale ou la protection de la biodiversité.
Si aujourd’hui la majorité de l’opinion a saisi les enjeux liés à la protection animale, en 1974, année de création du refuge, ce n’était pas forcément une évidence !
Effectivement, lorsque ce refuge a été créé il y a 50 ans, on se rend compte qu’il cochait déjà toutes les cases qui font aujourd’hui l’actualité environnementale : la protection de la faune sauvage et de la biodiversité, mais également la protection de la faune locale grâce à notre centre de sauvegarde de la faune sauvage locale Valentine et Jacques Perrin. Afin de bien mesurer la situation actuelle, notre centre de sauvegarde accueillait en 2011 un peu moins de 300 animaux, aujourd’hui il en accueille 1 000 de plus par an ! Ce qui est vraiment beau et fort dans cette aventure, c’est d’avoir imaginé tout ça il y a un demi-siècle. Il faut vraiment saluer le travail des équipes qui nous ont précédés et du fondateur, Christian Huchedé.
Quel bilan faites-vous de cette année 2023 ?
C’est un bilan encourageant pour notre refuge. Les efforts de communication ont porté leurs fruits plus tôt que nous l’espérions. Nous sommes notamment très présents sur les réseaux sociaux. Nous comptons accueillir d’ici à la fin de l’année 85 000 visiteurs, ce qui permet au refuge de l’Arche de demeurer le premier site touristique de la Mayenne. Comme tout le monde, nous ressentons les effets de l’inflation. Symboliquement, et pour la première fois, nos coûts en énergie ont dépassé ceux dédiés à l’alimentation de nos animaux. Inversement, cette hausse du coût de la vie a probablement incité les Ligériens à ne pas trop s’éloigner de leur région cet été. Ainsi, nous avons pu bénéficier de l’apport d’un tourisme local en progression par rapport aux précédents étés, notamment en provenance de la région d’Angers. Nous invitons les Mayennais à nous rendre visite.
Le refuge s’est également engagé dans une démarche de médiation auprès du public pour donner une dimension plus responsable aux visites.
Oui, depuis mai 2022 un poste est dédié à la médiation, ce qui nous permet de sensibiliser le public à notre engagement. Pouvoir répondre aux interrogations des visiteurs, toujours plus affûtés sur les sujets de protection animale et de biodiversité, enrichit leur parcours de visite. Nous aimons également l’idée que les gens restent plus longtemps. Le refuge est un lieu que l’on visite avec patience, où l’on apprend des choses sur le monde animal. De la patience, il en faut également pour guetter l’animal qui, contrairement à un zoo classique, peut à tout moment se retirer de votre regard. C’est la règle.
Outre le refuge et le centre de sauvegarde, le CEPAN* recouvre également un chantier d’insertion. Qu’en est-il de cette action ?
Notre chantier d’insertion a vu le jour en 1994, il s’agissait de l’un des premiers en Mayenne à l’époque. J’ai l’habitude de dire que, si le refuge tend la patte aux animaux, alors il tend aussi la main à toutes ces personnes, cabossées par la vie, qui nous rejoignent quelques mois parfois plus longtemps dans la limite de deux années. Ce chantier d’insertion, porté par le Conseil départemental, accueille dix-neuf personnes. Il représente pour elles une opportunité de se relever d’une passe professionnelle ou personnelle difficile, c’est un tremplin vers plus de stabilité ou vers l’emploi, avec un accompagnement socioprofessionnel dédié. Beaucoup sont aides-soigneurs ou en charge de l’entretien des lieux et de l’accueil du public. La particularité de notre chantier d’insertion tient au contact quotidien avec les animaux. Quand vous êtes à hauteur de regard d’animal, une forme d’humilité s’opère et cela participe à vous reconstruire. Nous sommes fiers de compter parmi nos salariés permanents des personnes ayant fréquenté le chantier d’insertion.
En 2018, le bâtiment d’accueil et la boutique ont été réhabilités. Quels autres projets ont été menés depuis et le seront prochainement ?
Parmi les travaux structurants, le nouvel espace aux tigres de 2 000 m² a été réalisé en 2021 grâce à la fondation Brigitte Bardot. Ici, nous sommes devant la future volière qui accueillera douze macaques de Tonkean début 2024, face à notre île des babouins. Les travaux sont réalisés en partie par nos équipes. En 2020, nous avons mis en service la passerelle qui permet au public de s’avancer au cœur de la plaine des buffles. D’autres projets sont à l’étude comme la réhabilitation de notre bâtiment des fauves, les volières pour nos primates… Mais déjà, nous devons nous projeter vers 2028, année où sera mise en application la loi qui interdira la présence d’animaux sauvages dans les cirques itinérants. Cette loi nous concerne indirectement. Un premier comptage fait état de 500 animaux, mais ce chiffre est en deçà de la réalité. Le défi s’annonce difficile à relever, et d’ores et déjà nous nous inscrivons dans une future démarche d’accueil, c’est une évidence pour une structure comme la nôtre.
Un centre de sauvegarde et un refuge
Le club d’études et de protection des animaux et de la nature (CEPAN) gère deux établissements complémentaires, le refuge de l’Arche et le centre de sauvegarde de la faune sauvage locale Valentine et Jacques Perrin. Ce dernier, créé en 2011, non accessible au public, a pour mission la prise en charge d’animaux blessés ou en perdition. Il les soigne puis les relâche dans la nature. Sa zone d’action correspond à la Mayenne, au Maine-et-Loire et à la Sarthe. En 2022, le centre a pris en charge 1 341 animaux. Si vous trouvez un animal en difficulté, appelez le 02 40 68 77 76, on vous mettra en relation avec le centre de sauvegarde. Quant au refuge, il accueille 120 espèces, soit 1 000 animaux. De novembre à décembre, il est ouvert uniquement pendant les vacances scolaires, jours fériés et week-end, de 10h à 17h. Fermeture annuelle le 25 décembre et le 1er janvier. Aire de jeux, restauration et espace pique-nique sont à disposition des visiteurs. Le refuge est accessible aux personnes à mobilité réduite.