« On les a bien schtroumpfés ! »

Quarante années ont passé, mais la magie opère à l’évocation de l’aventure européenne du Stade lavallois en Coupe UEFA, une madeleine de Proust pour nombre de supporters. Étrangement, ce sentiment agit aussi sur ceux qui n’y étaient pas, tant l’événement a marqué la ville et le département. Concrètement, ce parcours européen se résume à quatre rencontres disputées entre le 28 septembre et le 2 novembre 1983, contre le Dynamo Kiev (1er tour 0-0, 1-0) puis l’Austria de Vienne (1/16e de finale 2-0, 3-3). Les matchs à domicile eurent un immense retentissement populaire.

La tête de José Souto qui envoya le club au paradis ou la reprise de volée d’Éric Stéfanini scellant une première mi-temps d’anthologie contre Vienne sont à jamais marquées au fer rouge dans le cœur des 17 000 supporters présents lors des matchs à Le Basser.. Après l’élimination, le journal L’Équipe titra : « Laval, la tête haute », ce qui traduisait bien le sentiment général.

Thierry Ruffat, ancien rédacteur en chef de France Bleu Mayenne, fut non seulement un observateur privilégié mais un acteur de l’événement à part entière car la radio était à l’époque le seul moyen de vivre la rencontre en direct depuis Kiev ou Vienne : « À mon retour, je signais des autographes ! », rapporte, hilare, le journaliste. Le déplacement en Ukraine fut épique : « On a mis trois jours pour rallier Kiev. Les contrôles de sécurité à Moscou où nous avions fait escale furent drastiques pour les 7 ou 8 journalistes que nous étions. » Il fallait montrer patte blanche en cette période de guerre froide et de course à l’armement nucléaire.

« Pour ma part, se souvient-il, j’assurais l’intégrale pour Radio Mayenne, et, pendant mes interventions dans le multiplex de France Inter, Michel Le Mouël de Ouest-France prenait le relais. J’avais eu un mal fou à joindre la France par téléphone ! ». Des milliers de paires d’oreilles collées au transistor ont ainsi imaginé le match. Le journaliste, âgé de 26 ans à l’époque, se souvient « des esprits chagrins qui regrettaient de voir le club mayennais être un ambassadeur du football français sur la scène européenne ».

Face au Dynamo de Kiev comptant huit internationaux, dont le légendaire Oleg Blokhine (Ballon d’or 1975), le Stade lavallois, qui ne jouait pas dans la même cour, réalisa l’un des plus grands exploits de son histoire. Et, de cet exploit, une réplique signée du gardien Jean-Michel Godard jaillit au micro de Radio Mayenne à l’issue du match aller : « Je crois que les Soviétiques nous ont pris pour des Schtroumpfs. Alors, on les a bien schtroumpfés ! »

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