Retour
Décodeur
01/08/2023

Isabelle Girard (UIMH 53) « Une période d’incertitudes »

  • Partagez  'Isabelle Girard (UIMH 53) « Une période d’incertitudes »' sur Facebook
  • Partagez 'Isabelle Girard (UIMH 53) « Une période d’incertitudes »' sur Twitter
  • Partagez 'Isabelle Girard (UIMH 53) « Une période d’incertitudes »' sur LinkedIn

La saison estivale est ouverte. Quels constats pour les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration en Mayenne ? Quelles tendances se dessinent en termes de demande, d'offre, mais aussi de main-d'œuvre ? En concertation avec son conseil d'administration, Isabelle Girard, gérante du Relais de la Malle à Laval et présidente de l’UMIH (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie en Mayenne) apporte des réponses. Sans alarmisme excessif, elle porte un regard lucide sur une situation fragilisée par plusieurs déséquilibres et qui doit faire face à différents défis.

« Les habitudes de consommation changent »

Comment s'annonce l'été pour l'hôtellerie en Mayenne ?

Concernant le secteur de l'hôtellerie en Mayenne, à l'approche de l'été, les indicateurs ne sont pas encourageants. Début juin, le niveau des réservations pour la saison estivale était très inférieur à celui de juin 2022. La baisse du pouvoir d'achat n'est sans doute pas étrangère à ce phénomène, dans le contexte inflationniste qui pèse sur les charges des professionnels du secteur. Les charges énergétiques à une saison où l'usage de la climatisation est quasi systématique pèsent sur les tarifs de nuitées.

À ces raisons s’ajoutent des éléments conjoncturels, comme le succès des structures plus alternatives et écologiques. On voit émerger de nouveaux modes de consommation, qui ne sont pas sans impact sur notre secteur d’activité. Il faut aussi souligner la croissance des réservations à l'étranger, après des années creuses dues au Covid. Le choix de destinations locales et proches marque logiquement le pas.

Le premier semestre a-t-il été aussi compliqué ?

Non, il ne faut pas noircir le tableau. Pour l'hôtellerie, les six premiers mois de l'année se sont passés normalement, même si nous avons toujours un taux de réservation en dents de scie. C'est dû à la prédominance du tourisme d'affaires qui a porté l'activité ces six derniers mois.

Les locations saisonnières type Airbnb pèsent-elles dans la balance ?

C'est un sujet important pour nous aujourd'hui. Nous considérons les meublés de location saisonnière comme une véritable concurrence. Le nombre de ces meublés courts séjours est estimé à près de 200 sur Laval. Ils représentent une concurrence cachée pour le secteur de l'hôtellerie. Pour clarifier et équilibrer la situatio,  nous encourageons la municipalité à faire bon usage de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016. Elle prévoit dans ce cadre le libre choix des municipalités de moins de 200 000 habitants d’imposer une déclaration de location de sa résidence principale comme meublé de tourisme. Cette démarche débouche sur l’attribution d’un numéro de location saisonnière, repris par les sites de location. La fiscalité suit, pour récupérer des taxes de séjour et équilibrer la balance. C’est une question de volonté politique. Elle aura aussi la vertu de mettre en évidence que la ville de Laval ne manque pas d’hôtes, s'il on prend la peine de recenser les meublés locatifs.

Isabelle Girard (UIMH 53) « Une période d’incertitudes »

Qu’en est-il pour les autres secteurs, parmi lesquels la restauration ?

Nos adhérents gestionnaires de bars et de centres de loisirs indoor bénéficient d’une dynamique positive. Le succès des bars et autres clubs ne se dément pas. Le développement des activités étudiantes à Laval contribue positivement à l’animation de ce secteur dans la ville préfecture. Seule la question du pouvoir d’achat fait planer l’inconnu. Mais le niveau actuel de l’inflation n’éloigne pas le consommateur de ces lieux. Pour les accueils et loisirs indoor s’ajoute l’inconnu de la météo. C’est une variable connue et assumée : quand elle est trop favorable, la 

La fréquentation ralentit. Quand le temps est plus incertain, les visiteurs arrivent en nombre. Concernant la restauration, la situation est tenable, à défaut d’être confortable. En effet, le consommateur peine à comprendre l’effet de l’augmentation des matières premières, qu’il subit pourtant à domicile. Conséquence, il revoit ses habitudes et consomme moins. La fréquentation reste à un niveau satisfaisant. Les incertitudes qui pèsent sur certains secteurs de l’économie (par exemple le bâtiment), pourvoyeurs de clients sur le temps du déjeuner, cristallisent la principale inquiétude de nombreux restaurateurs. Chez les traiteurs spécialisés dans l’événementiel, les clients simplifient et réduisent les options. Mais ce réflexe est compensé par une hausse de la demande.

Espace Mayenne a-t-il un impact positif à Laval ?

On ne mesure pas d’impact particulier sur le secteur de la restauration. Sur celui de l’hôtellerie, en revanche, on constate les effets positifs des activités liées au business. Pour la part réservée aux activités culturelles, pas d’effet tangible. Nous avions l’espoir qu’elles permettraient de remplir nos plages creuses du week-end. Ce n'est pas le cas. Nous constatons pas de dimunition significative du nombre de jours creux dans les carnets de réservation. 

Comme l’explique la présidente de l’UIMH 53, le consommateur peine à comprendre l’effet de l’augmentation des matières premières, qu’il subit pourtant à domicile. Conséquence, il revoit ses habitudes et consomme moins.

Pour le département en général, le tourisme est-il important ?

Oui, c’est certain, et le territoire a de nombreux atouts touristiques à faire valoir, aujourd’hui et pour l’avenir. Nous avons d’ailleurs participé à une opération de promotion du département à Paris, dans le quartier du Marais. Cette dynamique du tourisme en Mayenne est positive. Mais attention : elle nous amène encore et toujours à la question du personnel et des jours d’ouvertures, l’autre grand enjeu du moment... Si on ne règle pas cette question prioritairement, le gain d’attractivité touristique ne sera pas suivi par une progression de l’offre dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration. Cela créera une impression de vide.

Vous éprouvez de véritables questions et difficultés concernant le recrutement et la main-d’œuvre...

C’est certain. La période de la Covid a été l’accélérateur d’une tendance de fond animée par l’évolution de la démographie et l’inversion de la courbe du chômage. Pour tout aggraver, il faut ajouter l’évolution des mentalités vers une société de loisirs. Aujourd’hui, c’est compliqué de remonter la pente. Pour l’hôtellerie et la restauration, le personnel encadrant est aussi compliqué à trouver que le reste des salariés et intérimaires. La logique s’est complètement inversée. On ne recrute plus en fonction de la clientèle, mais on adapte la clientèle au nombre de salariés. Cela crée une tension. Les clients veulent sortir, mais qui va servir ? Nous sommes de moins en moins souples et réactifs. Par conséquent, notre organisation est très impliquée dans la communication auprès des jeunes, dans les écoles.

Type éditorial